Vins « naturels », vins « nature », vins « S.A.I.N.S », vin « sans sulfites ajoutés », n’en jetez plus !

Et du vin, tout simplement, ça existe encore ? A trop vouloir en faire, nous n’arrivons plus à nous comprendre !

Un client me demande un jour si j’ai « du vin sans rien, juste avec des raisins », « du vin naturel quoi ! », poursuit-il, comme si c’était cause entendue.
Je le questionne afin de savoir ce qu’il recherche exactement, et après quelques minutes d’échange, il s’avère qu’il recherchait des vins orange (en savoir plus sur les vins orange ici)…

Cet évènement m’a fait comprendre qu’à vouloir affubler les vins d’adjectifs différents pour tenter de mieux les définir, on ne faisait que créer la confusion totale dans l’esprit du consommateur. Une confusion nourrie par tous les médias et bloggeurs qui relient une information sans même chercher à en comprendre le sujet.

Alors, entre le vin bio, le vin biodynamique, le vin traditionnel, le vin sans sulfites ajoutés, le vin sain, le vin naturel, le vin nature, on ne sait plus vraiment de quoi on parle.
Faisons le point entre ces différentes « notions » et ce qu’elles sous-entendent en matière de viticulture et de vinification.

Qu’est-ce qu’un vin bio ?

Le vin Bio ou issu de l’Agriculture Biologique est certainement celui que l’on connaît le mieux, car ce type d’agriculture existe depuis longtemps. Elle est en outre OFFICIELLEMENT contrôlée par des organismes de certification indépendants qui, en accordant l’agrément sur les vins produits, permettent l’apposition du label officiel sur l’étiquette de la bouteille.
En Agriculture Biologique:
– la culture de la vigne se fait sans utilisation de produits chimiques de synthèse. Je précise bien « de synthèse », car les produits de lutte que sont le cuivre et le soufre, même s’ils sont autorisés en Bio, restent des pesticides au sens éthymologique du terme : pest signifiant « insecte ou plante nuisible, parasite » et -cide, du latin caedere signifiant « frapper, abattre, tuer ». Il s’agit donc d’employer des pesticides « biologiques ».
– Au chai, la certification bio impose des règles qui limitent certains intrants oenologiques, mais elles en autorisent la majorité. Il est donc possible d’utiliser des levures et bactéries exogènes pour garantir une fermentation réussie, d’utiliser certains agents d’acidification, de désacidification, de clarification et de stabilisation. Le dioxyde de soufre, ce mal aimé, est également autorisé, mais à des doses moindres que celles admises lors de la vinification traditionnelle.

Qu’est-ce qu’un vin biodynamique ?

Un vin biodynamique est un vin OBLIGATOIREMENT certifié « Agriculture Biologique » au préalable. La biodynamie s’inscrit dans un mouvement d’agriculture durable et impose un cahier des charges beaucoup plus restreint que celui de l’Agriculture biologique. Le label est en outre contrôlé par des organismes de certification indépendants. Plusieurs associations en Biodynamie proposent une certification selon un cahier des charges dont le plus restrictif est celui de l’organisation indépendante DEMETER.
En biodynamie:
– les pratiques de culture de la vigne sont les mêmes que celles de l’Agriculture biologique avec restriction supplémentaire sur l’emploi du cuivre: les doses maximales autorisées sont moitié moindres que celles de l’agriculture biologique. (voir l’article sur les labels ici)
– Au chai, le label biodynamique Demeter interdit la majorité des intrants oenologiques, n’autorisant l’utilisation de levures et bactéries exogènes que sur dérogation, la chaptalisation qu’avec du sucre ou du moût de raisin concentré, et la clarification uniquement à l’oeuf bio ou à la bentonite bio.
Acidification, désacidification et chaptalisation ne sont autorisées que sur dérogation.

Qu’est-ce qu’un vin naturel ?

Au début des années 90 apparaissent les vins bios, puis les vins biodynamiques Demeter. Ils étaient essentiellement vendus par les magasins spécialisés dans la vente de produits biologiques comme « Biocoop », « La Vie Claire », etc. On parlait alors de vins naturels, terme générique qui regroupait les vins bio et les vins biodynamiques.
Aujourd’hui, la tendance est de considérer les vins naturels comme des vins « sans rien », des vins obtenus avec un minimum d’intervention, un léger sulfitage, et pas d’additifs oenologiques. Elle résulte d’une volonté de certains vignerons de se démarquer des autres, et de montrer au monde entier qu’ils sont capables aussi de faire des beaux vins sans avoir recours à de multiples procédés permettant de corriger des défauts ou des déviances apparus lors des fermentations.

Certains assimilent les vins naturels aux vins dits « sans sulfites ajoutés ». Mais pour moi cela n’est pas cohérent: ces vins ont certes été produits sans ajout de sulfites pendant les différentes étapes de la vinification, mise en bouteille incluse, mais cela n’exclut pas l’utilisation de produits correctifs pour acidifier, ou chaptaliser, ou l’utilisation des levures ou des bactéries exogènes.

En outre, le terme de « vin naturel » n’a aucune validité officielle, il ne fait pas partie des mentions obligatoires ni facultatives du code de la consommation en terme d’étiquetage.
Un vin que l’on vous présentera comme « vin naturel » n’est pas une garantie, puisqu’il n’y a aucun cadre définissant les méthodes de culture ou de vinification.
Vous verrez parfois une bouteille arborant un logo « AVN » pour « Association des Vins Naturels ». Cette dernière tente de définir une charte de bonne conduite, mais elle ne peut offrir de garantie sur le travail effectivement réalisé par ses vignerons membres puisqu’aucun organisme de contrôle indépendant et agrémenté ne vient vérifier les bonnes pratiques…

 

Et le vin nature ?

Les vins « nature » suivent la même logique que les vins naturels décrit ci-dessus.
Un vin portant la mention « nature » n’a pas de valeur légale, le comité national de l’agriculture biologique de l’INAO a d’ailleurs récemment précisé que « réglementairement, le mot nature ne peut pas être utilisé pour le vin. Selon le codex agroalimentaire, ne peuvent prétendre à ce terme que les aliments bruts, qui ont été à la limite tranchés ou râpés. Mais pas fermentés ou conditionnés… ».
Beaucoup entendent par vin « nature », des vins sans sulfites ajoutés, ou avec peu d’interventions dans le déroulement des vinifications, mais le flou est total.

Et le vin sain ?

Le terme de vin « sain » vient d’une association S.A.I.N.S dont le sigle signifie Sans Aucun Intrant Ni Sulfites (ajoutés): une petite parenthèse à la fin du sigle qui a son importance, car un vin sans sulfites (ou SO2 ou dioxyde de soufre) n’existe pas, les sulfites étant naturellement produits par les levures lors de la fermentation.
Cette association regroupe une poignée de vignerons souhaitant définir et cadrer ce que signifie, pour eux, le terme « vin sain ». Elle définit une charte à laquelle les vignerons doivent adhérer, mais aucun organisme de contrôle externe et indépendant ne vient vérifier les bonnes pratiques, donc… c’est ce que dit le vigneron qui fait foi.

Un vin naturel est-il forçément bio ou biodynamique ?

Non, un vin dont l’étiquette mentionne « vin naturel » ou « vin nature » ne signifie pas qu’il est bio ou biodynamique. Il faut pour cela qu’il affiche les logos AB ou Demeter ou Biodyvin.

 

Les vins « naturels » garantissent l’emploi de levures indigènes ?

Non, les vins naturels ne le garantissent pas. En revanche, les vignerons en biodynamie travaillent uniquement avec les levures indigènes, puisque l’utilisation de levures exogènes doit faire l’objet d’une dérogation.

Mais beaucoup d’autres vignerons utilisent les levures indigènes quelque soit le mode de vinification choisi, bio ou conventionnel: l’emploi ou non de levures sélectionnées ne dépend alors que du vigneron, et si vous recherchez absolument un vin vinifié avec levures indigènes, alors il faudra lire attentivement les contre-étiquettes des bouteilles, ou les fiches techniques des cavistes en ligne qui le précisent.

Est-ce qu’un vin sans sulfites ajoutés est forçément un vin bio ?

Non. Il n’y a aucun lien. Rien n’empêche un domaine viticole pratiquant une vinification traditionnelle de produire des cuvées dites « sans sulfites ajoutés ». Cette mention n’existe pas dans le codex alimentaire, mais elle est ajoutée à titre  d’information pour que le consommateur sache si le vin a fait l’objet d’un sulfitage ou non.

Comment être sûr de trouver un vin sans intrants œnologiques ?

Beaucoup d’entre vous recherchent un vin sans intrants œnologiques, un vin dont on aurait pas corrigé le moût par divers procédés pour en faire un vin parfait. Pour cela, vous pouvez déjà vous tourner vers les vins en Biodynamie, où la majorité des intrants oenologiques sont interdits: la plupart des vignerons adhérant à cette philosophie assument leurs choix et ne corrigent pas leurs vins. Les levures et bactéries utilisées sont indigènes, et le sulfitage n’est réalisé qu’à de faibles doses. Beaucoup d’ailleurs se contentent de ne sulfiter qu’à la mise en bouteille, moment délicat où le risque d’oxydation du vin est élevé.
L’avantage des vins biodynamiques est qu’ils sont contrôlés par des organismes indépendants comme Ecocert et la certification est entérinée par l’apposition des labels comme Demeter, Biodyvin, etc.

Mais il existe beaucoup de vignerons honnêtes qui font du vin de grande qualité, en respectant leur environnement et sans aucune certification. Il faut pour cela bien les connaître ou trouver un caviste de confiance, objectif et rigoureux dans sa sélection, qui saura vous guider vers des vignerons consciencieux.