Comme évoqué dans mon précédent billet ici, visiter la belle-famille est l’occasion pour moi de faire un petit voyage à Viana de Castelo (Portugal), au nord de l’appellation du Vinho Verde. La culture du vin y est omniprésente, il est d’ailleurs rare d’y voir une maison sans pieds de vigne.

Pour visualiser rapidement l’étendue de cette appellation, la carte ci-dessous en définit l’emprise et les sous-régions caractéristiques pour lesquelles l’encépagement, les pratiques culturales et le type de vin varient.

Carte de l’appellation Vinho Verde. (Source : Comissão de Viticultura da Região dos Vinhos Verdes)

Si le vin blanc est le plus réputé de l’appellation Vinho Verde, on y produit également des vins rouges. D’ailleurs, dans la région du Lima, certaines familles font encore le vin rouge elles-mêmes, avec leur propres raisins, à l’ancienne : foulage rapide, macération de quelques jours, et on soutire le jus dans de petites cuves inox. Vous l’avez compris, ce vin est à consommer rapidement dans les mois qui suivent, on est sur un produit plus que « nature ». J’ai eu l’occasion d’en boire plus d’une fois : très peu alcoolisé (généralement entre 5 à 6% d’alcool), il a une couleur rouge violacée qui teinte la dentition avec autant d’assurance que le font les myrtilles. Au goût, il est acidulé, fruité, légèrement mousseux, et ne possède pas une once de tanins. Il doit son succès local à l’effet désaltérant qu’il procure, notamment lors des chaleurs écrasantes qui peuvent parfois sévir dans la région en été. N’étant pas très fan de ce type de vin rouge, j’ai donc naturellement, et à tort, considéré que les seuls vins de Vinho Verde dignes d’intérêt étaient les blancs.

Mais Zafirah est venu me prouver le contraire. Je ne m’attendais pas à un telle élégance : très gourmand, le nez dévoile d’élégantes notes de fruits rouges et noirs, où s’affirment tour à tour la cerise, la fraise, la mûre, ou encore la myrtille, le tout saupoudré d’une pincée de cannelle, de cacao et de cacahuète. En bouche, le jus se fait de velours, frais comme la brise marine de son pays, offrant des notes acidulées typiques de la région. Zafirah, qui es-tu ?

Zafirah est produit dans la région de Monção-Melgaço, où l’encépagement diffère de celui de la région du Lima où résident beau-papa et belle-maman : si le cépage rouge dominant de la région du Lima est le Vinhão (c’est lui, le coupable à l’origine du vin rouge mousseux qui vous maquille les lèvres de violet), celui majoritairement cultivé à Monção-Melgaço est l’Alvarelhão : c’est à lui que l’on doit ce superbe vin savoureux à la couleur rubis et au bouquet délicat.

Les raisins proviennent de vignes âgées de 70 ans et cultivées par Xavier Ferreira selon un mode de conduite ancestral « em latada », c’est-à-dire en treillis ou pergola.

Système de conduite en Treillis ou Pergola. (Source : https://sistemasdeproducao.cnptia.embrapa.br)

Les treilles reposent sur des piliers de granite à section carrée joints deux à deux par des barres métalliques entre lesquelles sont tendus des fils de fer horizontaux pour former un filet à larges mailles sur lequel s’étalent les vignes ; ce mode de conduite ancestral qui permettait de faire du maraîchage sous la vigne tend aujourd’hui à disparaître au profit d’une taille moderne en cordon. C’est la raison pour laquelle le viticulteur Xavier Ferreira, souhaitant perpétuer la tradition des vignes en pergola, invita Constantino Ramos, l’oenologue du célèbre domaine Anselmo Mendes, à vinifier ses raisins et donner naissance à Zafirah, une cuvée composée d’un assemblage de quatre cépages rouges : l’Alvarelhão, majoritaire, le Borraçal, le Pedral, et un peu de Vinhão. L’Alvarelhão apporte au vin son bouquet délicat, le Borraçal et le Pedral leurs acidités, et le Vinhão ses notes de petits fruits des bois ainsi qu’un peu de couleur. Les raisins sont égrappés à 90%, et fermentés en présence des levures indigènes. Le moût est ensuite élevé pendant 6 mois, pour moitié en cuves inox et pour moitié en barriques de chêne français. Son potentiel de vieillissement est d’environ 5 à 7 ans. 

La bouteille est scellée avec un bouchon garanti TCA free (autrement dit, le bouchon n’est pas contaminé par la fameuse molécule TCA ou TriChloroAnisol, responsable des vins bouchonnés) et le col est habillé d’une étiquette portant le numéro de la bouteille : c’est la 373ème bouteille du millésime 2017 qui aura donc l’honneur de figurer sur ce blog.

 

Zafirah, du haut de tes 11,5% d’alcool, avec ton parfum délicat et élégant, ta fraîcheur toute marine et ta saveur acidulée, tu m’as conquise !