mas-saint-michel

Mas Saint Michel – Domaine Sarda-Malet.

Situé au sud du quartier Mailloles de Perpignan et à proximité du fort du Serrat d’En Vaquer, le domaine, actuellement dirigé par Jérôme Malet, possède une histoire longue de quatre générations, une histoire dont chaque virage fut pris par des « Jérôme ».

Tout débute au début du XXème siècle lorsque l’arrière grand-père de Jérôme Malet achète, début 1910, quelques parcelles de Grenache qu’il cultive pour la production de raisins. Son fils, Jérôme Sarda (grand-père de Jérôme Malet) se passionne très vite pour ces pieds de vignes, et plante dans les années 1930 d’autres pieds de Grenaches gris, blancs et noirs, en complément de ceux hérités de son père. C’était un jardinier amoureux des plantes plus qu’un producteur de vins, dont la fabrication était suivie et dirigée par un œnologue. Il aimait par dessous tout soigner ses vignes comme on soigne un potager. Plusieurs années après, son fils, Max, alors courtier à Rungis, vient bouleverser le paysage viticole du Roussillon lorsqu’il reprend la succession du domaine en 1985, en introduisant de nouveaux cépages.
De jeunes et nouveaux plants de Mourvèdre, Syrah, Malvoisie, Roussanne et Marsanne tiennent alors fièrement compagnie aux bons vieux grenaches de l’époque. L’équipement de la propriété étant rudimentaire, Max et sa femme Suzanne investissent en 1984 dans l’achat de barriques de chêne, et mettent en bouteille leur premier vin blanc en 1985.
En 1993 ils sortent le tout premier millésime des cuvées «Terroir Mailloles». Des vins qui sont pour eux la plus fidèle expression de leur terroir.
Jérôme Malet, fils de Max Malet et entrepreneur avisé à la tête de plusieurs sociétés, poursuit les explorations et expérimentations tel que l’ont fait ses parents, passant de l’agriculture raisonnée à la certification Bio. Il entame depuis peu des essais en Biodynamie dont on en verra peut-être le fruit dans quelques années.
Il a également récemment investi dans un château de la vallée du Rhône, le domaine de Fontbonau, en partenariat avec Frédéric Engerer, gérant des propriétés viticoles de François Pinault.

LE TERROIR

Le domaine se situe dans la plaine du Roussillon, aux portes de Perpignan, sur la rive droite de la Têt.
Les parcelles, en pentes douces, sont majoritairement exposées sud/sud-ouest. Elles apparaissent comme les dernières enclaves « agricoles » proches d’une urbanisation toujours plus galopante, dans une région dont le patrimoine archéologique semble avoir été méprisé. On peut lire dans différents guides ou blogs que le terroir sur lequel sont plantées les vignes du domaine Sarda-Malet, le terroir «Mailloles» en l’occurrence, avait déjà forte réputation au XVIIème siècle. Aucun document n’a permis de valider cette allégation. Il est, en revanche, indéniable que le site même sur lequel se situe le domaine Sarda-Malet est extrêmement riche d’une histoire qui remonterait au temps des Wisigoths, dont on aurait retrouvé des traces «à environ deux kilomètres de Perpignan, dans le lieu de Malloles, nommé aussi dans les anciens titres Villa Gothorum, vel Malleolas.» (Extrait de « Histoire Générale de Languedoc avec des notes et les pièces justificatives »,Tome III, Dom Claude de Vic et Dom Vaissette).
Une campagne de prospection archéologique menée par L’Association Archéologique des Pyrénées Orientales en 2010 dans le secteur de Sainte-Barbe où se situent le domaine et ses vignes, conclut dans son éditorial qu’il s’agit «d’un territoire, dont on peut penser qu’il a été cultivé intensément et régulièrement entre les XVème et XVIIIème siècle.» Un autre rapport de l’association sur le site archéologique de Passió Vella à l’université de Perpignan nous indique que le terroir de Mailloles (autrefois orthographié Malloles) était un parc d’artillerie, avec probablement une forge présente aux environs, comme semble l’indiquer ci-dessous une carte représentative du siège de Perpignan en 1642, et extraite du rapport de l’association d’archéologie :

carte-territoiremailloles-1642

Carte du Territoire de Mailloles – 1642

Ce même rapport stipule en outre que «ce n’est qu’à partir du XVIIème siècle qu’apparaissent des vignes sur ces coteaux.» (à l’emplacement du site de Passió Vella, n°7 sur la carte).

galets-roulesLe terroir de Mailloles, en vérité, trouve son originalité dans le sol. Ce dernier se compose de terrains tantôt argilo-calcaire, tantôt argilo-silicieux, et de terrasses de galets roulés sur Günz rouge… sur quoi ? Sur Günz rouge : le mot «Günz» est le nom d’une rivière allemande de 55km de long traversant toute la Bavière, que deux géographes allemands, Albrecht Penck et Eduard Brückner ont également attribué à une période de glaciation : «Les noms de quatre affluents du Danube (Günz, Mindel, Riss et Würm) ont servi aux allemands Penck et Brüchner, en 1909, à dénommer les quatre grands niveaux de terrasses étagées que l’on trouve ordinairement le long des fleuves d’Europe. Pour presque tous les auteurs, terrasses et glaciations sont liées, si bien que ces noms ont aussi servi à dénommer les quatre glaciations alpines, dont on retrouve assez facilement la trace. Malheureusement, on ne sait pas très bien quand et comment se forment les terrasses.» explique Jean-Paul LEGROS, dans son ouvrage «Les grands sols du monde».

echelle-geologique-gu%cc%88nz

Echelle Géologique – Période du Günz (flèche rouge) – Source: BRGM

En revanche, ce dont on est sûr, c’est que les terrasses de Günz se sont formées à la fin du Quaternaire. « Les quatre grandes terrasses habituellement observées le long des fleuves européens se sont formées pendant la toute dernière partie du Quaternaire. Elles constituent, sans erreur possible, une séquence ordonnée par l’âge », précise Jean-Paul LEGROS, dans ce même ouvrage.
En outre, ces terrasses, très semblables à celles de Châteauneuf-du-Pape avec ses galets roulés, possèdent dans la plaine du Roussillon, des nappes souterraines importantes qui apportent en profondeur de la fraîcheur et une humidité bienvenues pour les pieds de vignes. Sans compter la brise marine ou la Tramontane qui garantissent des conditions sanitaires optimum pour une bonne maturation des raisins.
Il ne reste plus que le savoir-faire du vigneron, un travail rigoureux, méthodique et une volonté de produire des crus qualitatifs pour obtenir les vins soyeux et généreux que nous propose le domaine et qui font l’actuelle renommée des cuvées «Terroir Mailloles».

LA VIGNE

Depuis le premier pied de vigne planté au siècle précédent jusqu’à aujourd’hui, les sols ont été respectés par un travail naturel: aucun désherbant, juste des labours, des amendements organiques et des pulvérisations d’extraits d’algues. L’utilisation du souffre et du cuivre est limitée au maximum, les doses appliquées sont deux fois inférieures à celle autorisées en Agriculture Biologique dont le domaine a la certification depuis 2013.

vigne-du-domaineUn travail en bio rendu possible au prix de quelques sacrifices. En effet, l’équipe de six ouvriers encadrée par l’œnologue Sophie Mage arrivée en 2010 au domaine, passe deux fois plus de temps dans le vignoble pour la surveillance et les soins biologiques, il a fallu donc en réduire la surface et par conséquent arracher bon nombre de pieds de vignes.

AU CHAI

Le chai est maintenu a une température constante de 14°C et une hygrométrie de 85%. La vinification est faite de manière traditionnelle sans intrant ni ajout de produits œnologiques. Le domaine veille toutefois à ce que le minimum nécessaire de sulfites soit ajouté au dernier moment pour assurer la protection des vins.
Les jus de presse, séparés des jus de goutte, sont parfois réintégrés à la sortie de l’hiver, tandis que les lies de fermentation sont travaillées à part et, suivant les millésimes, réincorporées au vin au fur et à mesure de l’année. Il n’y a donc pas d’opérations de soutirage ni pour les blancs ni pour les rouges. Les rendements sont volontairement limités, se réduisant, pour les cuvées Terroir Mailloles, à 20hl/ha pour le rouge et 15 hl/ha pour le blanc. Lors de la mise en bouteille, les vins ne sont ni collés  ni filtrés, ces opérations pouvant avoir un impact sur l’aromatique finale.
Dernière particularité du domaine : ne commercialiser son vin qu’à partir du moment où il peut être bu. Le consommateur a la garantie que le vin a poursuivi son évolution dans les meilleures conditions. C’est la raison pour laquelle les millésimes actuellement commercialisés pour les cuvées de garde datent… de 2008.

LA DÉGUSTATION

C’est l’un de nos moments préférés: la découverte de ce qu’il y a dans le verre !

Le domaine Sarda-Malet produit des vins tranquilles blancs rouges et rosés en appellation Vin de France et Côtes du Roussillon, ainsi que des vins doux naturels en appellation Rivesaltes et Muscat de Rivesaltes.

appellationroussillon2

Carte des appellations du Roussillon.

Nous avons été particulièrement charmés par les cuvées haut de gamme « Terroir Mailloles » et les vins doux naturels blancs et rouges.

terroirmaillolesblanc-sardamalet-blog-m

Terroir Mailloles Blanc – 2008 – VignArtea®

Indomptable, libre et sauvage, « Terroir Mailloles 2008 » blanc nous délivre – non sans fierté – ses arômes typiques des vins blancs de la Méditerrannée. En plein apogée, les parfums de miel et de fruits exotiques sont suaves et intenses, les saveurs anisées nous caressent le palais comme le ferait la chevelure délicate d’un fenouil. Les raisins dorés et extrêmement concentrés de Marsanne, Roussanne et Grenache Blanc, sont entrés dans une valse aromatique étourdissante qu’un élevage d’un an en fût de chêne a permis d’assagir. Les lies de fermentation incorporées au fur et à mesure de l’élevage confèrent au vin de l’onctuosité et de la richesse en bouche. Sa finesse et sa fraîcheur en feront le meilleur ami des poissons nobles cuisinés avec les saveurs sudistes de l’ail, de l’anis ou des graines de fenouil.

terroirmaillolerouge-sardamalet-blog-m

Terroir Mailloles 2008 – VignArtea ©

Issu du même terroir – les fameux galets roulés sur terrasses de Günz- que la cuvée précédente, « Terroir Mailloles 2008 » rouge est un vin produit à partir de Mourvèdre et de Syrah, les cépages de l’appellation Côtes du Roussillon plantés par Max et Suzanne Malet – les parents de Jérôme Malet – en 1985. Les vignes étaient alors âgées d’une vingtaine d’année. Le rendement limité de 20 hl/ha fournit des baies juteuses et concentrées qui font l’objet d’une lente macération avant d’effectuer un élevage en fût de chêne d’un an. Mise en bouteille en 2010, ce vin a eu le temps de se reposer six longues années en bouteille et de développer un bouquet d’une extrême sensualité, mêlant la noble fragrance des myrtilles aux subtiles notes camphrées du romarin. Intensément parfumé, il est d’une redoutable gourmandise et ses notes tertiaires de cuir feront la part belle aux viandes rôties accompagnées des saveurs typiques de la garrigue !

 

rivesaltesgrenat-sardamalet-blog-m

La Carbasse 2008 – Rivesaltes grenat – VignArtea ©

« La Carbasse 2008 »… On dit de lui qu’il est l’un des plus beaux Rivesaltes de la région. Sa renommée n’est pas volée. Les vieilles vignes de Grenache noir à l’origine de ce vin doux naturel affichaient déjà près de 63 ans au compteur en 2008. Muté sur grains, le vin a fait l’objet d’un élevage d’un an en cuve close, comme l’exige l’appellation Rivesaltes Grenat, avant sa mise en bouteille en Octobre 2009.

Ce mode d’élevage en milieu réducteur lui confère des jolis arômes de fruits confits, de pruneau et de cacao. L’acidité naturelle équilibre merveilleusement bien la sucrosité du vin doux. Du caractère et de la générosité pour ce beau Rivesaltes ensoleillé !

muscatderivesaltesblanc-domainesardamalet-blog-m

Muscat de Rivesaltes 2012 – VignArtea ©

Côté blanc, le « Muscat de Rivesaltes » ne nous a pas laissé indifférent. Il est issu de Muscat d’Alexandrie, un cépage dont les rendements sont variables, « de 40 à 100 hl/ha, parfois davantage » (Extrait du « Dictionnaire encyclopédique des cépages et de leurs synonymes » , Pierre Galet). Au domaine, ces derniers n’ont pas dépassé les 18 hl/ha. La saveur musquée du raisin est d’autant plus prononcée que les rendements sont faibles.

Après une très courte macération pelliculaire et une dizaine de jours de fermentation, le moût est muté par addition d’alcool neutre à 96°.

Les parfums suaves de fleurs se mêlent amoureusement aux riches notes de fruits exotiques, la bouche est gourmande et  équilibrée. Voilà un joli vin de dessert qui pourra se prêter avec grâce au jeu du sucré-salé en l’accompagnant d’un tajine au citron confit par exemple…